Henry le maudit

Troisième de l'élection du Ballon d'Or, oublié par la FIFA pour le titre de joueur de l'année, Thierry Henry est constamment snobé lors des remises de titres individuels. Toujours placé, jamais gagnant, le Français a de quoi se sentir lésé d'autant que son année 2006 a été un exemple de régularité.

Thierry Henry est l'archétype de l'attaquant que tout entraîneur rêverait d'avoir dans son effectif. N'importe qui accueillerait le Français à bras ouverts à partir du moment où le Gunner en montrerait la moindre once d'envie. Même le FC Barcelone, roi d'Europe en 2006 et paré d'une doublette exceptionnelle avec Ronaldinho et Samuel Eto'o, a essayé d'attirer le numéro 12 des Bleus cet été du côté du Camp Nou. Tout le monde aime Henry. Enfin, presque...

Depuis 1999 et son arrivée au club d'Arsenal, le Français a gagné ses galons de joueur qui compte, jusqu'à devenir sans doute le meilleur attaquant du monde. Régulier tout au long de la saison, Thierry Henry a pris pour habitude de faire mal aux défenses de janvier à décembre. Ses quatre titres de meilleur buteur en Premiership (2002, 2004, 2005 et 2006) en sont une preuve des plus probantes. Pour autant, malgré son rayonnement, l'international français (91 sélections, 39 buts) est constamment snobé lors des remises de prix internationaux. L'élection du Ballon d'Or 2006 et la short list établie par la FIFA pour élire le joueur de l'année en sont une nouvelle preuve.

De tous les combats

En 2006, Thierry Henry a pourtant été de tous les combats. Que ce soit en club avec Arsenal ou en équipe de France lors de la Coupe du monde 2006, le Français a été sous le feu des projecteurs. Finaliste de la Ligue des Champions et du Mondial, l'ancien Monégasque a disputé les deux rencontres les plus importantes de l'année. Certes, il les a perdues toutes les deux. Mais cette constance au plus haut niveau auraient dû lui valoir mieux qu'une troisième place à l'élection du Ballon d'Or, où il fut dominé par les deux champions du monde Fabio Cannavaro et Gigi Buffon. Lauréat 2006, Cannavaro n'a pas volé son trophée, loin de là, mais l'a conquis sur un mois exceptionnel alors que "Titi" Henry a réussi une grande année.

Pour ce qui est de l'élection du joueur FIFA de l'année, le constat est semblable. Oublié de la short list dont Ronaldinho, Fabio Cannavaro et Zinédine Zidane font partie, Thierry Henry n'aurait pas juré en accompagnant deux de ces trois joueurs. Et même en l'emportant. Mais comme les journalistes européens (Ballon d'Or), la Fédération internationale - par la voix des sélectionneurs et capitaines des équipes nationales - ne l'a pas entendu de cette oreille. Dans ces conditions, ou même une année pleine ne suffit pas, on se demande bien si Thierry Henry aura une fois le suprême honneur de monter sur la plus haute marche d'un podium individuel (ndlr : Henry a été deux fois 2e du classement FIFA; une fois 2e, une fois 3e et trois fois 4e du Ballon d'Or).

"Pas ma priorité"

Dès avant la remise du Ballon d'Or 2006 à Cannavaro, "Titi" semblait avoir fait son deuil d'un éventuel triomphe. "J'y ai pensé, je n'y pense plus. Ce n'est pas ma priorité. Je ne suis pas venu dans le football pour les récompenses individuelles." Un brin paranoäique mais surtout dépité, le Français pense que les journalistes sont ses plus farouches adversaires. "C'est la vérité: ce sont eux qui votent. A Moscou, dernièrement, on m'a refusé un but, je ne sais pas pourquoi, j'ai d'ailleurs pris un carton pour main volontaire alors que je n'ai pas touché le ballon de la main. Vous pouvez comprendre que je pouvais être énervé à la fin du match. Ce que je veux dire, c'est qu'après, dans la zone mixte, quand j'ai dû passer voir les journalistes, je n'étais pas très chaud pour parler. Si, dans le lot, il y avait quelqu'un qui doit voter pour le Ballon d'Or..."

Même s'il affirme ne plus en faire une priorité, Thierry Henry est évidemment touché par ce désamour. Parfois distant et critique envers la presse, le Gunner paie un peu cela au niveau du Ballon d'Or. En 2003 déjà, il n'avait pas apprécié le succès de Pavel Nedved qui, selon lui, avait été offert au Tchèque par les votants d'Europe de l'est. On ne pouvait pas lui donner tort. Mais il était également difficile d'aller contre le fait établi que Thierry Henry et Arsenal ne pesaient pas très lourd sur le front européen et que ce défaut majeur ne pouvait lui offrir le trophée tant convoité. Tout le contraire de 2006. Et pourtant, le Français n'a pas été récompensé. Et s'il existait toujours une bonne raison d'oublier Thierry Henry ?